La grande pauvreté masquée des grandes villes
Marseille, Paris ou Strasbourg par exemple, comptent plus d’habitants vivant dans des quartiers très pauvres que bien des communes défavorisées. Cette grande pauvreté peut passer inaperçue, si l’on s’en tient au taux de pauvreté moyen de la métropole.
Publié le 5 octobre 2023
https://www.inegalites.fr/La-grande-pauvrete-masquee-des-grandes-villes - Reproduction interditeLes grandes villes françaises hébergent un grand nombre de personnes pauvres. Pas uniquement des sans-abri, mais une frange bien plus large de célibataires, couples ou familles très modestes. Leur présence est « diluée » par la taille de la ville : elle disparait dans les données moyennes à l’échelle communale. Pourtant, les chiffres sont édifiants.
À Paris, le taux de pauvreté (au seuil à 60 % du revenu médian) est de 15 % en moyenne, mais plus de 100 000 personnes vivent dans des quartiers [1] où ce taux dépasse les 30 %, selon les données 2019 de l’Insee. À Strasbourg, 85 000 personnes sont dans le même cas, 71 000 à Montpellier et même 244 000 à Marseille. Si l’on pouvait découper ces métropoles en zones plus fines, à l’évidence, elles apparaitraient en haut des classements des villes les plus pauvres alors que la moyenne communale leur donne une apparence plus flatteuse. Le découpage administratif joue un rôle évident dans la manière dont on analyse la géographie des revenus et de la pauvreté, en particulier quand on réalise des classements par commune.
L’« embourgeoisement » d’une partie des centres-villes est relatif. Il s’agit le plus souvent seulement d’une partie minime du « cœur de ville ». Et encore dans de très nombreuses villes françaises, les quartiers populaires ne sont guère éloignés de ces centres aisés. À Paris par exemple, en plus d’un siècle, la pauvreté s’est écartée du centre et s’est déplacée vers le nord-est de la capitale. Elle n’est pas allée si loin que cela. Le quartier de Belleville n’est qu’à deux kilomètres de l’hypercentre devenu ultra-riche, et le taux de pauvreté atteint jusque 48 % à certains endroits selon l’Insee.
Population des quartiers très pauvres dans les grandes villes | ||
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Taux de pauvreté moyen de la ville en % | Nombre d’habitants vivant dans un quartier où le taux de pauvreté est supérieur ou égal à 30 % | |
Marseille | 26 | 244 000 |
Paris | 15 | 102 000 |
Strasbourg | 25 | 85 000 |
Montpellier | 27 | 71 000 |
Lille | 25 | 71 000 |
Toulouse | 20 | 54 000 |
Nice | 20 | 49 000 |
Toulon | 15 | 38 000 |
Lyon | 15 | 33 000 |
Bordeaux | 16 | 20 000 |
Source : calculs de l’Observatoire des inégalités d’après l’Insee – Données 2019 – © Observatoire des inégalités
Crédit photo / © PeeterV
[1] Il s’agit ici des « Ilots regroupés pour l’information statistique (Iris) », le niveau géographique le plus fin diffusé par l’Insee. Un Iris abrite environ 2 000 habitants.
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