Les inégalités sociales d’espérance de vie se réduisent chez les hommes mais augmentent chez les femmes
Les hommes cadres vivent cinq années de plus que les ouvriers. Chez les femmes, l’écart entre cadres et ouvrières est de trois ans. Ces inégalités sociales se réduisent chez les hommes, mais augmentent chez les femmes. Article extrait du Centre d’observation de la société.
Publié le 20 septembre 2024
https://inegalites.fr/inegalites-esperances-de-vie-selon-categorie-sociale-et-sexe - Reproduction interditeLes inégalités d’espérance de vie sont considérables entre groupes sociaux. À 35 ans, un cadre supérieur peut espérer vivre encore 49 années en moyenne, c’est-à-dire jusque l’âge de 84 ans, dans les conditions de mortalité de la période 2020-2022 selon l’Insee [1]. Un ouvrier peut compter sur encore 44 années, soit vivre jusque 79 ans. Une femme cadre de 35 ans peut espérer vivre encore 53 ans, contre 50 ans pour une ouvrière. L’écart d’espérance de vie entre ouvriers et cadres est donc de cinq ans chez les hommes et de trois ans chez les femmes.
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De nombreux facteurs expliquent ces écarts. Les catégories favorisées consultent plus souvent des médecins, accèdent à des soins de meilleure qualité et plus rapidement. Mais ces éléments ne sont pas les plus déterminants. Les habitudes de vie comptent beaucoup : les milieux sociaux ne portent pas la même attention à leur corps, que ce soit en matière d’alimentation, de tabagisme ou de prévention. Les ouvriers sont deux fois plus souvent fumeurs que les cadres par exemple. Les moins qualifiés commencent à travailler plus tôt et occupent des emplois plus durs physiquement, qui usent les corps. Dans les métiers pénibles, particulièrement chez les hommes, l’endurance à la douleur est valorisée (parfois obligatoire pour ne pas perdre son travail) et peut conduire à reporter à plus tard une consultation médicale.
Ces inégalités entre milieux sociaux se conjuguent avec des inégalités liées au genre. Les femmes ouvrières ont en effet une espérance de vie supérieure à celle des hommes cadres. Essentiellement parce que femmes et hommes n’ont pas le même rapport au corps, aux pratiques à risque et à la santé et ne travaillent pas dans les mêmes conditions, mais aussi du fait de facteurs génétiques.
Les dernières données de l’Insee font apparaître un changement de tendance inédit. Pour la première fois depuis leur publication par l’institut, l’écart d’espérance de vie à 35 ans se réduit entre les cadres et les ouvriers chez les hommes. Alors que celui-ci était toujours supérieur à six années depuis les années 1970 (et même à sept pour la période 1991-1999), il a baissé à 5,3 années pour la période 2020-2022. Ce n’est pas le cas chez les femmes pour qui les inégalités entre les ouvrières et les cadres tendent au contraire à s’accroître légèrement, de 3,1 années en 1976-1984 à 3,4 années en 2020-2022.
Pour expliquer ce retournement de tendance chez les hommes, l’Insee signale un possible effet de la baisse de la mortalité suite à un cancer du poumon. C’est l’inverse chez les femmes, pour qui les taux de mortalité liés à cette maladie continuent à progresser. Il est aussi possible que les ouvriers aient davantage bénéficié que les ouvrières d’évolutions techniques réduisant la pénibilité extrême du travail et qu’ils soient aussi mieux informés par des messages de prévention. L’élévation du taux d’activité féminin dès les années 1960-1970 fait que, globalement, les femmes des générations qui décèdent aujourd’hui ont eu des carrières plus longues, qui se rapprochent de celles des hommes. Les femmes ouvrières en subissent les conséquences, ce qui se répercute sur leur espérance de vie.
Source : Insee – © Observatoire des inégalités
Source : Insee – © Observatoire des inégalités
Extrait de « Les inégalités sociales d’espérance de vie se réduisent chez les hommes mais augmentent chez les femmes », Centre d’observation de la société, septembre 2024.
[1] « Les écarts d’espérance de vie entre cadres et ouvriers : 5 ans chez les hommes, 3 ans chez les femmes », Nathalie Blanpain, Insee Première n° 2055, Insee, juillet 2024.
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