Les vingt quartiers prioritaires les plus pauvres de France
Dans les quartiers les plus en difficulté, plus de 70 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Un taux près de cinq fois plus élevé que la moyenne nationale. Notre classement des vingt quartiers prioritaires les plus pauvres de France.
Publié le 10 décembre 2024
https://www.inegalites.fr/Les-vingt-quartiers-prioritaires-les-plus-pauvres-de-France - Reproduction interditeVingt quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) affichent des taux de pauvreté supérieurs à 63 % [1] selon les données 2021 de l’Insee. Ces taux sont entre quatre et cinq fois plus élevés que la moyenne nationale (15 %). Ils font apparaitre une concentration importante de la pauvreté dans certains territoires.
Avec des taux de pauvreté de 75 %, les quartiers « Bas-Vernet Ancien ZUS » et « Rois De Majorque », à Perpignan, sont les plus pauvres parmi les plus pauvres. Un autre quartier prioritaire de Perpignan aussi arrive en troisième position de notre classement avec un taux de 73 %. Suivent ensuite des QPV de Nîmes, Béziers, Toulon et Carpentras, où plus de 70 % de la population vit avec moins de 1 200 euros par mois (le seuil de pauvreté pour une personne seule, après impôts et prestations sociales). Nous touchons là les sommets de la pauvreté en France, avec des quartiers où presque toute la population est démunie.
La quasi-majorité des 20 quartiers les plus pauvres se situent dans le sud de la France, dans les Pyrénées-Orientales, le Gard, l’Hérault, le Var, ou encore le Tarn. Deux sont des quartiers de la commune de Troyes dans la région Grand Est et un autre est situé dans la banlieue de Nantes en Loire-Atlantique.
Tous ces territoires concentrent les logements sociaux dont le rôle premier est d’accueillir les populations les plus modestes qui n’ont pas les moyens de se loger dans le privé. Ce qui explique en grande partie le haut niveau de pauvreté de ces quartiers souvent délaissés par les ménages une fois que leur situation financière s’améliore.
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Les critères et limites de notre classement
Pour établir le top 20 des quartiers prioritaires de la politique de la ville les plus pauvres, nous avons trié ces territoires par taux de pauvreté [2] (au seuil de 60 % du revenu médian) parmi les 1 362 QPV pour lesquels cette donnée est disponible [3]. Nous prenons en compte ici le découpage des quartiers prioritaires entré en vigueur le 1er janvier 2024. Ces données concernent seulement les QPV de France métropolitaine, nous ne disposons pas des chiffres pour les territoires d’outre-mer.
Attention, notre classement mélange des territoires au nombre d’habitants très différent. 16 500 personnes résident à « Pissevin-Valdegour », à Nîmes, où le taux de pauvreté est de 72 % : on y trouve donc près de 12 000 personnes pauvres. « Laden Petit Train » à Castres, avec ses 1 000 habitants et un taux à peine plus bas (69 %), en compte seulement 700 qui vivent sous le seuil de pauvreté. Si on avait considéré l’ensemble des QPV de France métropolitaine et divisé en « sous-quartiers » les plus peuplés, on aurait probablement identifié ailleurs des taux de pauvreté aussi élevés que ceux qui apparaissent dans notre classement. C’est le cas par exemple du quartier « Franc Moisin-Cosmonautes » en Seine-Saint-Denis, qui englobe une partie des communes d’Aubervilliers, de La Courneuve et de Saint-Denis et rassemble pas moins de 130 000 habitants, soit 130 fois plus qu’à Castres. Il ne figure pas dans notre classement alors que plus de 55 000 de ses habitants sont pauvres.
Les 20 quartiers prioritaires de la politique de la ville les plus pauvres de France métropolitaine | ||||
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Commune | Population | Taux de pauvreté (%) | Nombre de personnes pauvres | |
Quartier Bas-Vernet Ancien ZUS | Perpignan (66) | 2 483 | 75 | 1 862 |
Rois De Majorque | Perpignan (66) | 1 382 | 75 | 1 037 |
Quartier Champs De Mars | Perpignan (66) | 1 680 | 73 | 1 226 |
Pissevin-Valdegour | Nîmes (30) | 16 500 | 72 | 11 880 |
Iranget Grangette | Béziers (34) | 3 871 | 71 | 2 748 |
Pontcarral | Toulon (83) | 1 437 | 71 | 1 020 |
Pous-du-Plan | Carpentras (84) | 1 481 | 71 | 1 052 |
Laden Petit Train | Castres (81) | 1 024 | 69 | 707 |
Cantepau | Albi (81) | 1 986 | 69 | 1 370 |
Jules Guesde | Troyes (10) | 1 708 | 67 | 1 144 |
Le Viguier-Saint-Jacques | Carcassonne (11) | 1 734 | 67 | 1 162 |
Chemin-Bas D'Avignon-Clos d'Orville | Nîmes (30) | 7 254 | 66 | 4 788 |
Devèze | Béziers (34) | 3 225 | 65 | 2 096 |
Ile De Thau | Sète (34) | 3 415 | 65 | 2 220 |
Le Sillon de Bretagne | Saint-Herblain (44) | 1 183 | 65 | 769 |
Rodrigues-Barleté | Agen (47) | 2 175 | 65 | 1 414 |
La Madeleine-Maréchal Leclerc | L'Aigle (61) | 1 379 | 65 | 896 |
Val de l’Aurence Sud | Limoges (87) | 4 575 | 65 | 2 974 |
Sénardes | Troyes (10) | 1 647 | 63 | 1 038 |
Narbonne Est | Narbonne (11) | 1 674 | 63 | 1 055 |
Ensemble des quartiers prioritaires | 5 300 000 | 44 | 2 400 000 |
Source : Insee – Données 2021 – © Observatoire des inégalités
Plus jeunes et défavorisés
La pauvreté élevée des 20 quartiers prioritaires de notre classement s’explique en partie par des caractéristiques qu’ils ont en commun. Si leurs habitants disposent de faibles ressources, c’est notamment en raison de leur profil. Ces territoires concentrent en effet les catégories de population les plus exposées à la pauvreté.
Ainsi, les moins de 25 ans représentent près de 40 % de la population des quartiers prioritaires (donnée Insee 2020), soit un tiers de plus que la moyenne nationale (29 %). La jeunesse représente même près de la moitié de la population de certains des quartiers de notre classement, comme à « Pissevin-Valdegour » (Nîmes) » et à « Val de l’Aurence Sud » (Limoges).
Les familles monoparentales constituent un tiers des ménages des quartiers de la politique de la ville, soit trois fois plus que la moyenne nationale. Dans les quartiers de « Cantepau » (Albi) et « Narbonne Est », elles en représentent même près de la moitié.
Les habitants des QPV sont beaucoup moins qualifiés : on y compte 44 % de non-diplômés en moyenne contre 25 % en moyenne nationale. Mais le taux atteint 70 % à « Pontcarral » (Toulon) et 60 % à « Pous-du-Plan » (Carpentras). Les populations les plus pauvres sont aussi celles qui ont eu le plus de difficultés scolaires dans un système éducatif français très inégalitaire.
Enfin, un quart de la population de ces quartiers défavorisés est étrangère, contre 8 % en moyenne nationale. À « Pous-du-Plan » (Carpentras) et « Le Sillon de Bretagne » (Saint-Herblain), cette proportion atteint presque 50 %. Dans ce domaine, les écarts sont très grands entre les quartiers. Ainsi, à « Ile De Thau » (Sète), cette proportion est de 16 %.
C’est la vocation même de ces quartiers au sein desquels la part d’habitat social est très grande que d’accueillir les ménages qui ont le plus de difficultés, souvent avec de faibles niveaux de qualifications, pour leur permettre de se loger dignement. Le logement est d’ailleurs l’un des éléments qui doit permettre de stabiliser leur situation et, pour une partie d’entre eux, de quitter ce type d’habitat une fois insérés dans la vie professionnelle. Il est logique dès lors qu’on y trouve une forte concentration de jeunes, d’étrangers, de familles monoparentales et de personnes peu diplômées, notamment. Des critères qui, d’ailleurs, peuvent se cumuler.
Ces quartiers pauvres sont, dans la plupart des cas, loin de l’image qu’on en donne parfois, bien que le chômage, le travail précaire et les faibles revenus y soient beaucoup plus répandus qu’ailleurs. Les quartiers présentés ici ne sont pas forcément situés où on les attend. Aucun ne figure par exemple dans la région parisienne. Il ne s’agit ni de « ghettos », ni de territoires de non-droit, mais de quartiers où la population pauvre est davantage concentrée, et qui sont parfois situés tout près de secteurs où règne l’extrême richesse.
Photo / CC By SA Vpe Wikimedia
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